Explorer ?

Ça y est j’ai franchi le pas, je l’ai pris ce fameux aller simple.

J’ai choisi le Pacifique, la Polynésie, une terre d'explorateurs, de nature et de magie. Un lieu où je vais démarrer une aventure qui promet d'être unique et transcendante. C’est un appel auquel je ne pouvais plus résister, tout comme celui de prendre des photos pour illustrer chacun de mes pas, les rencontres, le monde dans lequel nous évoluons. Pour assouvir ce besoin fort d’authenticité qui peut servir l’individuel comme le collectif… 

Ingénieur aéronautique, puis dirigeant, puis chef d’entreprise, aujourd’hui à 50 ans, je réalise avoir toujours essayé (sans réel succès) d’arborer une façade relativement classique, conforme à ce qui était attendu de ces différentes positions. En mode profil Linkedin bien rangé. Mais aujourd'hui, je sais que je suis un entrepreneur, que je n’ai plus besoin de carte de visite et qu’il est temps d’aller explorer hors des limites.

Cette mission à Tahiti n'est pas seulement une exploration de ces archipels incroyables qui s’étendent sur un territoire grand comme l’Europe, c'est surtout l’occasion d’un voyage à la rencontre des autres, et au plus profond de soi-même. Alors, j’ai ressenti pour la  première  fois  ce besoin d’écrire un journal de bord ! Très modestement j’aimerais que mes réflexions, mes émotions et mes inspirations puissent être une source d'apprentissage pour les futurs entrepreneurs, ceux  qui le sont déjà et ceux qui n’ont pas encore l’idée de le devenir.

Le chemin de l'entrepreneur

Pour celles et ceux qui ne me connaissent pas, je vous refais l’histoire rapidement.

Après des études d’ingénieur aéronautique à l’ENAC, ma carrière a pris son envol au sein de compagnies aériennes où j’ai rapidement compris que ce que j’aimais c’était construire, et non pas rester dans les cadres que d’autres définissent. C’est pourtant dans ces cadres que j’ai appris beaucoup pendant ces années, appris des meilleurs et des moins bons, appris des réussites  et des échecs. Oui les échecs, ceux qui m’ont le plus fait grandir, mais aussi ceux qui m’ont fait comprendre que je ne rentrais pas dans ces cases que l’on me proposait. Alors au bout de 10 ans, j’ai franchi le pas. J’ai monté ma propre boite. 

Ce n’est pas l’objet de cet article que de vous raconter Time to fly. Quinze ans d’entrepreneuriat ne peuvent pas se résumer en quelques lignes. 

Rien n’était tracé, je n’avais pas l’idée du siècle au fond de mon garage, j’avais juste cette envie de créer, de partir du point zéro. Alors j’ai construit, d’abord tout seul, en tâtonnant, en me plantant, puis en sachant rebondir, m’adapter, j’ai eu la chance de pouvoir bien m’entourer, de développer ma société, puis d’en lancer une autre. Fêter nos 10 ans en 2019. Déjà à ce moment-là, l’insistance de ma fille sur “tu fais quoi toi pour sauver la planète ?” m’a amené à me documenter, à me dire qu’il serait pas mal de commencer à regarder ce qu’on pourrait faire pour avoir de l'impact.  Et puis 2020 commence, on se prépare à lancer l’aménagement de nos nouveaux bureaux, nous sommes la société de référence dans notre domaine, la sécurité des vols, le support aux acteurs de l’aérien. Et puis, quand tu reçois les clés de tes bureaux, que tu es en train de valider le bon de commande de l’aménagement intérieur inspiré des locaux de Google, Linkedin et autres AirBnB, le confinement s’invite, la pandémie éclate, et tout semble s’écrouler.   

Dans ce laps de temps du premier confinement, je passe alors par tous les états ; l’incrédulité, la peur de tout perdre, la colère, la rébellion, le combat, la solitude, les décisions difficiles et enfin le rebond. Mais au fond de moi, je savais que quelque chose s’était révélé, quelque chose qui allait m’accompagner à partir de là. J’ai vécu comme un effondrement intérieur, une remise en question extrêmement inconfortable, mais finalement salvatrice. 

Alors, c’est d’abord l’entrepreneur qui a pris le dessus en gardant les projets à flot, en lançant la société dans l’ère du développement durable. Mais moi, à l’intérieur j’étais toujours en questionnement sur comment rebondir après avoir ressenti tout cela pendant des semaines. Cette ambiguïté de vouloir faire quelque chose pour sauver notre planète et cette nécessité de continuer d’entreprendre, dans ce milieu tellement pointé du doigt : l'aviation. 

Convaincu que nous avons besoin de renouer avec qui nous sommes, pour faire corps avec cette planète qui a besoin que nous transformions rapidement nos activités. 

Je dirais que ma nouvelle vie a commencé, violemment, à cet instant précis. Je savais à partir de ce moment ce qui me caractérisait définitivement professionnellement : j’étais, je suis, un entrepreneur. Oui, mais il y avait encore autre chose d’enfoui, que je devais découvrir… 

“The planet does not need more successful people. The planet desperately needs more peacemakers, healers, restorers, storytellers and lovers of all kinds.”

? Dalai lama

L'exploration intérieure : comme un vent de transformation

À ce moment-là, je dois avouer que ma vie a pris un tournant inattendu qui a bouleversé mes certitudes. Cette période tumultueuse m'a forcé à faire face à ma sensibilité, longtemps enfouie au plus profond de moi. Tout ce temps passé à suivre une image que j’aimais à transmettre de moi. J’ai longtemps cru que la sensibilité était antinomique de ma fonction de chef d’entreprise.

Et puis c’est toujours quand on s’y attend le moins que la solution se présente à vous, moi ce fut sous la forme de rencontres qui m’ont poussées à explorer - le mot est lâché - la photographie. 

D’abord dans un petit cercle fermé, puis à travers des workshops de l’excellente Valérie Jardin, j’ai pu découvrir la photo de rue, la #streetphotography, et j’ai tout de suite adhéré à cet art qui consiste à documenter notre époque à travers des photos de tranches de vie. C’est de cette manière que, mon Fuji X100V en poche, j’ai arpenté les villes, leurs rues et ruelles, les ponts et les places. Des clichés qui se voulaient chaque jour un peu osés, plus travaillés, un peu plus proches de ce que je voulais exprimer. 

Petit à petit, la photo est devenue mon refuge, un moyen de m’exprimer mais surtout un moyen de couper avec cette vie professionnelle qui prenait toute la place et ne m’en laissait pas.

À travers chaque cliché, j’ai la sensation de saisir un moment de la vie de ces personnes, je devine leurs pensées, leurs émotions, afin de documenter ce que je ressens de ce monde qui nous entoure. 

Partager ces photos, c’est comme une mise à nue car c’est une impression en couleur ou en noir et blanc de ma sensibilité. 

Donc voilà, le photographe est apparu, il complète l’entrepreneur, lui donne un espace pour se retrouver, pour se faire du bien. Mais il l’influence aussi et le pousse à ne plus faire qu’un. Un explorateur. 

L'exploration extérieure, avec le pacifique comme objectif 

L’entrepreneur et le photographe ont tous les deux entendu l’appel du Pacifique (je vous raconterai ça dans un autre article), l'appel a pris des formes différentes pour chacun, mais presque en même temps. Il était alors impossible de ne pas répondre. Changer de vie pour le photographe, et revenir à ce point zéro qui anime l’entrepreneur. C’est donc fin juillet que j’ai débarqué à Tahiti sur le vol French Bee, avec cette sensation d’un nouveau départ dès que je suis sorti de l’aérogare. Cet archipel est un véritable trésor pour l'entrepreneur photographe que j'assume enfin d'être, en quête de nouvelles perspectives. J'y vois l'opportunité de créer différemment, de m'inspirer des coutumes locales, du mana, et d'appréhender l'entrepreneuriat sous un nouvel angle, entièrement tourné vers cet écosystème naturel exceptionnel.

J’ai bon espoir que les leçons de cet archipel hors du commun puissent s'intégrer à une vision d'entreprise. Tout en alimentant une quête de sens et d'engagement envers la durabilité et la responsabilité sociétale qui nous incombe et dont les entrepreneurs sont les premiers acteurs.

Et voilà, en 3 mois Time to Fly Pacifique a vu le jour. Une entreprise différente et à nulle autre pareille, pas uniquement par la localisation, mais qui va trouver sa place auprès des autres sociétés du groupe avec sa propre identité - parce que façonnée par un entrepreneur, photographe et explorateur. 

Dévoiler son authenticité : j’y vais, mais j’ai (plus) peur.

Le journal de bord de l’explorateur pourrait ressembler à ça : 

Premier jour. Me voilà arrivé sur l’île. À peine mis le pied sur terre que je me mettais au travail. Premiers échanges avec les locaux, apprendre à les connaître, leurs méthodes et leurs envies. Et dans un second temps, comment je peux leur apporter quelque chose.

La première journée était intense, le jetlag se fait sentir,  mais je ne peux me résoudre à ne pas aller au bord de l’eau, aller voir Moorea.

Alors que je déambule face à l'océan et que je contemple un coucher de soleil insolent sur l'île soeur, je réalise que toutes ces dernières années ont secrètement conspiré pour me guider jusqu'à cette plage, à cet instant précis. (to be continued)

Tahiti, cette île chargée de sagesse et de magie ancestrale est déjà une véritable source d'inspiration. Par ses terres vierges et ses traditions millénaires, elle rappelle combien l'équilibre entre l'homme et la nature est essentiel pour créer un avenir responsable et prospère. 

Je me sens déjà imprégné de son énergie unique, convaincu qu’elle peut contribuer à m’aider à poser les fondations d'un entrepreneuriat différent, capable de faire face aux défis de demain avec une conscience aiguisée et une volonté de créer un impact positif sur le monde. 

En tant qu'entrepreneur, je crois que nous sommes ceux qui avons le pouvoir et la responsabilité d'agir sur le monde, de créer demain. 

Cela commence d’abord par l’exploration de nous-mêmes, puis en nous ouvrant à de nouvelles perspectives extérieures. Ainsi, nous avons la possibilité de repousser les limites et de transformer nos entreprises en véritables forces du changement positif.  

Pascal RAVEL